Un après Ars Musica 2012… témoignage sonore et visuel 1

•16 avril 2012 • 2 commentaires

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Ars Musica est enfin clôturé.  Résonances superbes et épuisements multiples de la toute petite équipe du festival qui s’est donnée corps et âme. Voici donc venir le temps des remerciements. A commencer par ceux à toutes les personnes chargées de la production des nombreux événements de ce printemps 2012. Dieu sait si je ne les ai pas ménagées avec mes journées portes ouvertes, Japon et consorts !!!

Et pour moi, un grand « Ouf » de soulagement, malgré le petit coup de blues qui pointe à l’horizon ; car gérer la programmation d’un Festival d’une telle ampleur ne laisse pas indemne. Mais voila, l’édition 2012 a tenu ses promesses. Des moments magnifiques, des bonheurs, mais aussi quelques heurts et malheurs divers (rappelez-vous notamment de cette semaine fatidique où le destin frappa par trois fois à notre porte : mercredi 21 mars, Benjamin remplace Boulez opéré à nouveau aux yeux ; le 22, annulation de l’événement « Evanescens » de Todor Todoroff (j’y tenais beaucoup !!!) suite à l’annulation du colloque ; et le lendemain, Thierry Fisher malade et annulation en dernière minute du concert de l’ONB avec la création de Fafchamps… la galère !).

Restent donc les moments musicaux bouleversants de ce mois de mars ; et surtout l’envie de vous remercier, vous, auditeurs-spectacteurs chaleureux, qui nous avez suivis tout aux long de ces semaines intenses, au gré des découvertes et autres pérégrinations sonores. Vous qui nous avez soutenus dans cette quête de l’Altra Cosa, de cette autre cause qui suggère que la musique du XXIe siècle n’est décidément plus exclusivement orientée selon les idéologies dominantes qui furent celles du XXe siècle. Merci à vous tous, à votre sens critique et à votre écoute passionnée. Merci à toutes ses personnes que j’ai rencontrées, auditeurs enthousiastes, amateurs éclairés, simples amoureux de musiques de notre temps, mais aussi musiciens et compositeurs, touts ceux qui ont partagé ces moments de rencontres et qui ont exprimé leurs désirs le temps d’une discussion, un verre à la main, ou en aparté, l’un ou l’autre griefs à la bouche pour toutefois imaginer une alternative « constructive » (c’est cela aussi le sens critique !).

Ars Musica 2012 résonnera encore quelque temps dans nos mémoires. Pour prolonger ces souvenirs, je profiterai de cette page pour vous offrir quelques échos du Festival passé, avec quelques photos prises avec mon modeste appareil (mais je vous renvoie aussi aux superbes pages facebook d’Isabelle Françaix, avec les merveilleux témoignages visuels qui ont accompagné la vie du festival durant tout ce mois passé) ainsi que quelques documents sonores, pas toujours de grande qualité car pris sur le vif avec quelques appareillages de fortune, mais suffisants pour nous rappeler la variété des propositions musicales des concerts à l’image de la diversité du monde d’aujourd’hui.

Pour commencer, un petit souvenir de la journée d’Anvers du 24 mars. Le Quatuor Kryptos, le pianiste Ralph van Raat, la belle voix de Els Mondealers et les talents de Simone Milsdochter que je découvrais pour la première fois à l’occasion de ce concert (et qui m’a littéralement « scotchée » par sa prestation bouleversante). Bref, tout ce petit mondé fut réuni en vue de la création des « Songs van de Schoonheid » du néerlandais Pim Moorer. Avant cette première, Frederic Rzewski, un certain Ledoux et Omar Daniel, compositeur canadien découvert lors de l’élaboration de cette programmation… avec Moorer, une très belle révélation !

Quant au programme, vous pouvez le retrouver sur la page dédiée à ce concert, en cliquant ICI.

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Ralph van Raat

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En guise de première oeuvre du programme, la quatrième des Piano Pieces de Frederic Rzewski (1977). Oeuvre diabolique aux notes incessamment répétées desquelles émergent quelques souvenirs de musiques chiliennes. Fabuleuse musique proposée par l’excellent pianiste hollandais Ralph van Raat.

[audio https://ledouxclaude.files.wordpress.com/2012/04/rzewski-pianopiece4.mp3]
Frederic Rzewski : Piano Piece IV (1977) – Ralph van Raat, piano   –  5’33 »

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Deuxième pièce inscrite au programme, mon deuxième quatuor à cordes « Play Time », hommage à Jacques Tati, avec à l’instar du film homonyme une recherche sur le sens des valeurs humaines (dans mon quatuor, le vrai sens des valeurs expressives de la musique au gré des trois mouvement qui composent la pièce : Pre-Lude / Micro-lude / Post-Lude. Avec le côté ludique en prime… Et surtout un grand bravo au quatuor Kryptos qui s’est lancé dans l’aventure de cette oeuvre redoutable.

[audio https://ledouxclaude.files.wordpress.com/2012/04/ledoux-quatuor2.mp3]
Claude Ledoux : « Play Time » pour quatuor à cordes (2004-révision 2011)  – 17’36 »
Quatuor Kryptos

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Omar Daniel derrière son ordinateur (regardez bien le fond d'écran de ce dernier, totalement adapté à la situation...)

Troisième Oeuvre de cette après-midi du 24 mars 2012, Annunciation du compositeur canadien résidant actuellement à Toronto Omar Daniel. Superbe enchaînement de miniatures destinées au quatuor à cordes transformé en temps réel par l’électronique. Comble de malchance, si la répétition fut magnifique, le concert fut entaché par quelques petits problèmes techniques…. Comme quoi les machines peuvent nous réserver bien des surprises (mais qu’est-ce qu’on les aime !!!). Donc ne soyez pas surpris par l’un ou l’autre petit craquement, ou par de petits « bugs » sonores dans l’enregistrement. Cela n’enlève cependant rien à la qualité de cette musique qui donne envie de connaître encore un peu plus le compositeur !

[audio https://ledouxclaude.files.wordpress.com/2012/04/daniel-annunciation.mp3]
Omar Daniel : Annunciation (2005) pour quatuor et électronique  – 16’49 »
Quatuor Kryptos, Omar Daniel, électronique

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Dernière pièce du programme, la création des « Songs van de Schoonheid » de Pim Moorer. Pièce magnifique, bouleversante, sur des textes superbes de Peter Verhelst. Un moment magique (du moins pour moi) de musique. Le parti pris esthétique est fortement assumé. Si la musique néo-tonale ne vous tente guère, peut-être que vous n’y trouverez pas votre bonheur (encore qu’en musique tous les miracles sont possibles !!!). D’autre part, si vous ne comprenez pas le néerlandais, je vous recommande de passer les première minutes articulées en un grand monologue parlé, interprété par l’incroyable Simone Milsdochter fabuleuse actrice (hélas, l’enregistrement ne lui rend absolument pas justice). Une révélation en soi… Et une mise en relief fulgurante du texte de Peter Verhelst, magnifique dans ses répétitions, ses rythmes subtils et sa mise en temps qui épouse si bien l’événement qu’il relate. Demeure alors la musique de Pim Moorer, une « autre musique » qui me bouscule et me touche profondément dans sa simplicité. Oui, j’assume ma subjectivité à l’égard d’une musique qu’un certain monde de la musique contemporaine préfère mettre de côté, comme inclassable, voire qualifiée de manière si inappropriée de « régressive » (ah les ravages d’Adorno !!!). C’est aussi cela Altra Cosa ! J’espère que ce moment de musique vous titillera autant qu’elle suscite chez moi une profonde émotion à son écoute.

[audio https://ledouxclaude.files.wordpress.com/2012/04/moorer-songs-van-de-schoonheid.mp3]
Pim Moorer : « Songs van de schoonheid »  sur des textes de Peter Verhelst  (création Ars Musica 2012)
pour récitante, mezzo, quatuor à cordes et piano
Simone Milsdochter, récitante / Els Mondelaers, voix / Quatuor Kryptos / Ralph van Raat, piano /
Pim Moorer, direction
(21’18  – musique à 2’58)

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Simone Milsdochter

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Quatuor Kryptos

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Pim Moorer et Ralph van Raat

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de g. à dr. : Omar Daniel, Anthony Gröger, Hanna Drzewiecka, Pim Moorer, Cl Ledoux

Voila donc un premier écho de ce Festival de mars. D’autres témoignages faits d’enregistrements amateurs suivront si la chose vous agrée. Ne vous attendez pas à une qualité de type radiophonique, mais pourquoi ne pas se laisser bercer, fasciner, par une source sonore offerte pour ce qu’elle est, souvenir ému d’un moment unique.

Au plaisir de vous retrouver prochainement…

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Omar Daniel, Els Mondelaers, Simone Milsdochter, Ralph van Raat, Hanna Drzewiecka, Anthony Gröger, Pim Moorer, Claude Ledoux

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Appel aux « Sons du Monde » – Call for « Sounds of the World » – ”世界の音”募集 – écoutez-les / time for listening

•17 février 2012 • 3 commentaires

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Attention, cette « longue » page nécessite un petit peu de temps pour être chargée dans son intégralité… Patience donc !

Attention : This « long » page needs some seconds to be complete… Be patient !

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Les voici. Ils arrivent jours après jours, en provenance des différents coins du monde. Pour vous faire partager cet événement, vous trouverez ci-dessous la liste des participants, leur origine, et les sons qu’ils nous proposent dans le format original. Ceux-ci sont disponibles au téléchargement au cas où vous désireriez réaliser une petite création sonore que nous serions heureux de diffuser lors de notre Festival, après accord de notre comité d’écoute.

Des nouveaux sons seront ajoutés en permanence sur cette page jusqu’à la mi-mars. Soyez donc fidèles à ce blog pour découvrir les nouvelles sonorités en provenance de multiples contrées.

Fêtez donc avec nous ce grand moment de rencontre planétaire…. Soit sur le net, soit en venant nous rejoindre lors de la journée « Japon – Sons du monde » du 18 mars où ils seront diffusés « live ». Rendez-vous à la Raffinerie – Bruxelles (infos sur la page www.arsmusica.be).

Et bonne écoute, quelque soit l’option du lieu !

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Here they are. They come day after day, from around the world. I’d like to share my commitment in this event, therefore, you will find below the list of participants, their origin, and the sounds they offered us (the original file). These are also available for downloading. If you want to realize a small sound creation, we would be happy to play it at our Festival, within the agreement of our « listening » commitee.

Day after day, new sounds will be released on this page. Please follow us and discover these wonderful gifts from the world.

So, celebrate with us this great moment of planetary encounter. On the net, or on March the 18th, within the framework of our « Japanese day – with Sounds of the world » at the Raffinerie – Brussels (see our program at www.arsmusica.be)….

Enjoy the « music » of our earth !

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Liste des participants – écoute / List of participants – Listening :

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Laurent Choquel (France) : Beynat – Etang de Miel (wav)

Prise de son aquatique, réalisée dans l’étang du village où j’habite. Cet étang s’appelle « l’étang de Miel » et dispose d’un plongeoir qui, à mon avis, offre une réponse comportementale et fréquentielle unique quand on l’utilise pour sauter dans l’eau (je pense surtout à la composante stridente…). La prise a été réalisée en août 2011 à 2 mètres environ de profondeur et à 3 mètres environ du point d’impact.

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Jacob Adler (USA) :  coyotes eating a jackrabbit under a full moon (mp3)

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Samuel ANDREYEV (Canada) : Toronto Digest (wav)

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Alexandr Barkovskiy (russe, Uzbekistan) & Cécile Hubert (belge, Uzbekistan) : 4 fichiers / 4 files (de/from Tashkent) :

– bednie-muzikanti-prosyat-dengi-na-ulica: Street musician begging for money (mp3)

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– ciganskaya-devochka-sobiraet-dengi-v-metro  : Gypsies woman begging for money (mp3)

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– Prodavec Somsa: Samsa street seller (mp3)

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– Slepie muzikanti na ulica: Blind musician playing Rubab on the street. (mp3)

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Maxime Barthelemy (France) : Brasil-Batucada in the street of Recife Antigo during Carnaval (wav)

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Blake Bertuccelli (USA-Jap) – Train in Japan (mp3- atention 6 min.)

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Robert Blatt (Oregon-USA) – Police against manifestation in Portland (wav)

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Florent Colautti (France) : pleurs et cri d’enfants suite à leur circoncision,  hopital de Ketou, Benin (wav)

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Ronald Coulter (USA) : Jackson Strret in Carbondale, Illinois, USA (aif)

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David Drexler (USA) : Sounds of a train echoing off the mountains surrounding the Grande Ronde valley in eastern Oregon, USA, recorded from the city of La Grande (wav)

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Frank Ekeberg (USA) : youth soccer tournament in Gilbert, Arizona, USA (mp3)

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Alin Gherman (Roumanie) : Monastère « Acoperamântul Maicii Domnului », département Suceava, Roumanie (mp3)

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Oliver Hancock (GB) : Reintroduces red kites (geese in background) at Harewood House, North Yorkshire (wav)

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Jin Ya HUANG (Taiwan) – musiques rituelles de rue – Taipei (mp3)

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Slavek KWI (Irlande)   : Amazon river pink Dolphin (wav)

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Coralie LONFAT (CH)  – genève, 14 février 2012, 18h, au centre ville sur le pont du Mont-Blanc (wav)

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Gilles MARDIROSSIAN (Fr) : Chant de pirogue-  ville des Abricots – Haiti (wav)

Son enregistré après le séisme qui a ravagé Port aux Princes en 2011, cet homme qui chante une chanson sur son village dans sa pirogue sur une petite rivière qui se jette quelques mètres plus loin dans l’Anse des Abricots au Sud de Haïti à été quelques semaines plus tard avec son village « Les abricots » dit le paradis des indiens , ravagée par un ouragan.

Donc son fixé d’un instant éphémère et vrai, que se soit le paradis ou l’enfer ou les deux, il y a toujours un attachement au lieu de vie, ou de naissance…une chanson, un son qui berçait notre enfance.

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Caito Marcondes (Brésil) – sounds from the mountains Sambento (wav)

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David Mooney (USA) – Street sounds-Pittsgurgh (wav)

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Emilie MOUSSET : ‘La piedra que tinta’ (Argentine -2009), site archéologique de Pulcara (NO du pays, près de Tilcara) (wav)

Prise de son en stéréo réalisée en Argentine en décembre 2009, sur le site archéologique de Pulcara (NO du pays, près de Tilcara), dont une des curiosités est une ‘pierre qui sonne’, pierre creuse produisant de magnifiques notes..j’ai passé un long moment avec des enfants à enregistrer cette pierre, et je me réjouis de partager ce son avec vous. 

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Maggi Payne (Canada) : Tomales Bay near Inverness, CA (wav)

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Kala Pierson (USA) : baby telling a story.  Philadelphia, Pennsylvania (mp3)

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Yiorgis SAKELLARIOU (Grèce) : Klaipeda, Lithuania (wav)

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Norihiko Setoguchi (Japon) : Pachinko sounds (mp3)

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Prof Peter J. Stollery(GB)  village of Alford in North East Scotland Harley Davidson parking up at the Grampian Motorcycle Convention (mp3)

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Kaoru Tashiro (Japan) :  wondering Lacombe-Louisiane (3 fichiers wav)

– wondering Lacombe-Louisiane 01 (wav)

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– wondering Lacombe-Louisiane 02 (wav)

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– wondering Lacombe-Louisiane 03 (wav)

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Tadahiko Tomiyama (Okinawa-Jap) : sounds from the seashores of Okinawa (mp3)

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Shinichiro Toyoda (Jap) : ambience and alert voice of « watch your step » at the platform of Tokyo Station Japan (wav)

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Michael TROMMER  : Bigwood Loons (wav)

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Gareth Whittock (GB) – Owls in Somerset (mp3)

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Azumi Yokomizo (Japan) :  Mikoshi  – festival music – Japanese traditional instruments (wav)

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Et une mention particulière à nos amis de SIngapour

And a special mention for our friends from Singapore :

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Vijayendran s/o Kanakalingam (Singapore) : Lion’s roar (wav)

taken during a football match between Singapore and Terengganu (state in Malaysia). The recording comprises of the voices of 8000 fans who were there that night screaming their lungs out for our home country Singapore.

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Teng Kian Leong (Singapore) – recording (wav)

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Lim Jian Wei (Singapore) Project 1 – noise with birds  (wav)

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Jun Jie Low (Singapore) – human noises in underground train station (wav)

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Yow Lip Pheng (Singapore) : Conversation in Singapore in 3 languages (Mandarin, Maly and English) (wav)

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Goh Kar Wei (Singapore) : beautiful toddler’s laughter, which encompasses his joy and happiness (wav)

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Choong Ee Teng Rimmel (Singapore) : Sounds from the day life (wav)

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Tai Khian Ping(Singapore) – recording (wav)

Taken inside a public bus (double decker) with two passenger on board while at the middle of the lower deck in the bus. Basically, it is the sound of the bus engine and it moving, stopping, with passenger boarding it, which I used to hear almost everyday and yet taken for granted.

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Lee Zhi Ying (Singapore) : Conversation at a coffeeshop in Singapore (wav)

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Saifulbahry Abdul (Singapore) : sound recording of the arrival and departure of a the local rail system’s train (wav)

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Eugene Soh (Singapore) : sample from the sunny island of Singapore (mp3)

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Megan Kathleen Elizabeth Shier (Singapore) : LunchCanteen (mp3)

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Gaw Yee Leng (Singapore) : Sounds of Singapore (wav)

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Gabriel Ong (Singapore) : Campus Wildlife / premises of Nanyang Technological University (wav)

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Alton Tang (Singapore) : lobby of my hostel (mp3)

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De Bruxelles à Bogota : l’énergie quasi-rituelle de Juan-Pablo Carreño

•16 février 2012 • Un commentaire

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Peu de mots pour cette page dont le noir sied si bien à certaines situations qui endeuillent à certains moments la préparation du festival…

Mais trêve de lamentations, car fort heureusement la musique vivante, celle qui se fait jour après jour devant nous, manifeste encore et toujours son incroyable vitalité. Vive le XXIe siècle ; et retour en Amérique Latine cette semaine avec une nouvelle rencontre passionnante. Celle que j’ai eu l’occasion de mener récemment avec Juan-Pablo Carreño, jeune compositeur colombien d’une trentaine d’années, qui s’est prêté aimablement au jeu des questions. L’enjeu est d’importance. Pensez-donc : l’artiste réside actuellement à la Villa Medicis de Rome. Il est de plus l’un des membres fondateurs de l’Ensemble Le Balcon dont on a déjà tant parlé. Et qui plus est, un compositeur extrêmement prolifique, engagé et passionné par les différentes formes d’Art. On pourra l’entendre lors du pré-concert du 8 mars. Mais sa présence aujourd’hui dans ce blog nous démontrera surtout, une fois de plus, la variété des multiples approches possibles de la création musicale  aujourd’hui.

Je n’écrirai pas plus pour manifester l’urgence de découvrir ci-dessous l’interview  audio d’une des personnalités fortes issues de ce petit groupe de compositeurs colombiens qui s’activent ardemment en France depuis quelques années. Et petit scoop, certains ont même bien voulu poser devant mon objectif pour la postérité… Qui sait, vous les rencontrerez peut-être au détour de l’un ou l’autre concerts de leurs oeuvres ? Certains sont déjà fortement ancrés dans la vie professionnelle, d’autres encore en formation dans la capitale-lumière. Mais des personnalités fortes qui ne laisseront personne indifférent.

Juan-Pablo Carreno / Juan-Camilo Hernandez Sanchez / Violeta Cruz

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Et du visuel au sonore, il n’y a qu’un pas. Place donc à l’audio !

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[audio https://ledouxclaude.files.wordpress.com/2012/02/carreno-entretien1.mp3]

Entretien 1 (4’52 »)

Où Carreño nous parle du Bacon dont il est un des membres fondateurs. Il rebondit ensuite sur les relations culturelles existantes entre la Colombie et la France depuis le début du XXe siècle, le temps d’une petite référence à la musique de Guillermo Uribe Holguin (avec un extrait des 3 Danzas pour orchestre de ce dernier – Württembergische Philharmonie Reutlingen, Gabriel Castagna, dir.)

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[audio https://ledouxclaude.files.wordpress.com/2012/02/carreno-entretien2.mp3]

Entretien 2 (5’48 »)

Dans ce deuxième extrait, le compositeur nous parle de sa vision des rencontres entre cultures mondiales au XXIe siècle. Il propose aussi quelques arguments concernant sa situation de compositeur colombien pris entre son pays et l’Europe.

avec un extrait de Negatifs (par Le Balcon) à 4’30

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[audio https://ledouxclaude.files.wordpress.com/2012/02/carreno-entretien3.mp3]

Entretien 3 (6’16 »)

Petit autoportrait, avec un témoignage émouvant de son vécu personnel immiscé dans sa relation à la musique ; et un extrait d’une œuvre forte, remarquable, à ne pas manquer malgré sa violence intrinsèque… Ronde, autour d’une machine à sous (à 3’18 »)

Pour étayer cette écoute, quelques commentaires du compositeur sur l’oeuvre :

Dans Ronde autour d’une machine à sous, l’utilisation du « si » comme axe central et la récurrence de l’utilisation des triangles qui articulent la forme, sont inspirées de l’œuvre Sola de Rodolfo Acosta, pour soprano et triangles – comme le rien pourrait inspirer le tout ou le chaste la luxure. Et le « si », comme dans Négatifs, signifie la même chose que pour Berg dans Wozzeck et pour Jacqueline Nova dans Los doce mobiles. Cela signifie la mort. La bande tente d’imiter le son d’une scie électrique, instrument utilisé en Colombie pour découper des paysans vivants. L’alto essaie d’imiter la scie électrique de la bande, avec un son sale, oppressif. L’alto et la bande à la fois symbolisent le compositeur qui cherche à s’approcher de l’intensité de la mort qu’il n’a jamais vue de près. Ronde commence par l’alto qui joue seul le si aigu comme un cri ou une invocation, et se termine par un solo d’électronique, masquant progressivement l’alto, qui ne joue pratiquement que le si aigu pendant deux minutes : c’est le faux son de la scie, voilà la trivialité de cette œuvre, qui fait taire le cri évocateur de la mort.

Mais comment reproduire un son que l’on ne connaît pas ?
Y a-t-il un sens à essayer d’imiter le son d’une scie électrique, quand inévitablement le résultat, aussi ressemblant soit-il, ne contiendra jamais ni cette colère, ni cette rage, ni ce dégoût, ni cette impotence, ni cette souffrance? 

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Que dire encore après le choc de la musique et des mots ? Sinon de revenir à des choses plus terre à terre et de rappeler que Juan Pablo Carreño est depuis l’automne dernier pensionnaire à la Villa Medicis de Rome. Lieu prestigieux dont il nous dévoile quelques bruits de couloirs d’ombres, tout autant que de ces projets futurs qu’il y développe.

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[audio https://ledouxclaude.files.wordpress.com/2012/02/carreno-entretien4.mp3]

Entretien 4  (5’11 »)

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Rendez-vous est donc donné pour découvrir deux compositeurs colombiens le 8 mars… Nous y serons vite ! Et n’hésitez pas à réserver dès maintenant car les places sont comptées.
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Rencontre avec Gregory d’Hoop

•10 février 2012 • Laissez un commentaire

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Cette fois, place à la jeunesse. Car un festival qui prône la nouveauté ne peut se passer de jeunes créateurs. Ceux-là mêmes qui constituent le vivier bouillonnant dans lequel s’inscrira les artistes qui feront le monde de demain. Et croyez-moi, la Belgique n’a pas à rougir de ses jeunes talents. En voici un, Grégory d’Hoop, musicien né en 1986, inscrit au coeur d’un mouvement pendulaire depuis qu’il partage son temps entre Bruxelles et Berlin où il réside actuellement. l’Allemagne est devenu sa terre d’accueil. Pour la petite histoire, Grégory s’est inscrit il y’a quelques années à l’Université des Arts de Berlin pour parfaire sa connaissance de la flûte à bec et a fini par découvrir de nouveaux élans compositionnels avec Elena Mendoza, Walter Zimmermann et Daniel Ott. Flûtiste à bec me direz-vous ? Et oui, un instrument peu fréquent parmi les compositeurs. Dès lors, entre l’instrument et l’écriture son coeur balance. Sans toujours prendre parti pour l’un ou l’autre. Le moins que l’on puisse dire est que sa pratique instrumentale aura eu une influence déterminante sur ses choix esthétiques. Le plus simple reste donc de lui laisser la parole pour que vous fassiez plus ample connaissance. L’interview réalisée récemment par Skype étant de qualité douteuse, j’ai préféré transcrire ses dires. L’occasion de lever le voile sur un tout jeune compositeur intimiste et diablement doué :

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Pour la composition, je ne me suis jamais posé la question de sa nécessité. J’ai toujours pratiqué la flûte à bec en parallèle à l’écriture musicale, et vice versa. J’ai d’ailleurs terminé il y a six mois mon cursus de flûte à bec à l’Université de Berlin, ce qui me permet depuis de me consacrer entièrement à la composition. De fait, les deux activités sont intimement liées car qui dit « flûte à bec » dit « Musique ancienne ». Dans ce milieu de la musique ancienne se posent beaucoup de questions quant à l’adéquation de l’écrit à la pensée, ce qui rejaillit sur les problématiques de notre époque ; c’est à dire, comment imaginer une musique du passé dont on ne connaît plus grand chose, et qui se reflète sur une musique qu’on a envie de créer aujourd’hui.

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La flûte à bec est certes un des instruments mythiques de la musique ancienne. Mais au vu des nombreux siècles qui ont généralisé son emploi, on risque de ratisser large sur la ligne du temps. As-tu une période historique de prédilection ?

L’Ars Nova, tout particulièrement ; une musique que j’ai découverte en la jouant, en examinant de près ses partitions. Ce domaine d’investigation est particulièrement stimulant car la musicologie contemporaine porte des regards neufs sur ce répertoire pour imaginer comment ces partitions pouvaient être interprétées à leur époque. Personnellement, c’est une musique qui m’a toujours parue à la fois extrêmement éloignée de nous, et à la fois extrêmement proche. Il y a une espèce d’étrangeté intrinsèque qui me motive fortement. J’ai toujours voulu comprendre les motivations, les idées qui se cachent derrières ces notes, ces écritures dont les conceptions temporelles semblent a-priori éloignées de nos conceptions actuelles. Dès lors, ces deux visions, passé et présent, rentrent en « collision », au point d’interroger la composition d’aujourd’hui. Il y’a des propositions rythmiques dans la musique de Guillaume de Machault, des constructions sous-jacentes que l’on peut lire dans ces partitions qui me fascinent. Des choses que l’on perçoit sans vraiment les entendre. Je trouve dès lors pertinent de m’inspirer de cette conception de la musique et de la « collisionner » avec un univers harmonique d’aujourd’hui. Ce mélange me semble tout à fait fécond. Ainsi pouvons-nous avoir une musique à la dimension temporelle dilatée selon les critères moyenâgeux, une musique qui travaille sur de belles proportions, et qui, harmoniquement, propose des couleurs étranges et originales, plus de notre temps.

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Umberto Eco notait dans son recueil d’article « La guerre du faux », que nous vivions un nouveau Moyen-Âge lorsqu’on examinait attentivement certaines dimensions idéologiques de notre époque, notamment sur les prévalances perceptives de notre époque. T’inscris-tu dans cette mouvance ?

J’avoue ne pas avoir réellement réfléchi sur la question. Ce qui m’intéresse avant toute chose, c’est de voir combien ces techniques et les collisions que ces références engendrent résonnent avec le temps présent. Et à partir de là, de concevoir des liens qui semblaient à première vue improbables, mais qui nous font prendre conscience, par exemple, de la manière dont on gère le temps en ce début de XXIe siècle. Quant à l’auditeur, outre le fait que les mélomanes d’aujourd’hui sont peut-être plus « éduqués » à la musique ancienne, il percevra directement les enjeux liés à ces préoccupations inscrites dans mes pièces ; tant le temps y est « élastique », comme une résultante des différentes conceptions temporelles que j’ai assimilées au gré de mes étude d’oeuvres musicales de l’histoire. 

Tu fais en permanence référence au temps musical dans tes propos. Mais l’une des grandes découvertes de la musique du Moyen-Âge fut tout de même la conquête de l’espace acoustique par le biais de l’écriture polyphonique…

Certainement. Il ne faut jamais oublier l’endroit dans lequel cette musique fut créée. Si l’on prend par exemple, un motet de Dufay, la complexité de cette musique devait induire chez l’auditeur une surprise sans précédent. Pour prendre une image forte, cette musique aurait été perçue comme  une espèce de cinéma 3D de l’époque. Les sons surgissaient de partout. Il existe d’ailleurs des descriptions bien connues d’auditeurs de l’époque de Dufay, dont une, très célèbre, qui témoigne de cette submersion de l’écoute ; au point que ces voix, si nombreuses et en provenance de tellement d’endroits, donnaient l’impression d’entendre la voix de Dieu. La transcendance ressentie dans cette musique est dès lors intimement liée à l’écriture, à l’acoustique du lieu et à la conception du temps qui les relie. 

Aujourd’hui, les instruments, comme par exemple ceux du quatuor à cordes, sont totalement différents, au même titre que les acoustiques variées de salles de concert. Mais par des jeux d’écriture, j’aime réactualiser cette problématique décrite précédemment. Essayer – par la gestion minutieuse des instrumentistes, de leur intimité sonore  – de créer l’illusion de la multiplicité des origines spatiales comme c’était le cas chez Dufay ; de donner la sensation qu’une voix peut provenir de différents endroits. Pour être plus modeste, mon désir est d’élaborer ainsi une petite « miniature » qui offre cette sensation d’être submergé par la musique en travaillant sur les imbrications subtiles entre rythmes et harmonies, des enluminures sonores tellement raffinées qu’elles finissent par oblitérer la teneur réelle du temps musical.

Si on se réfère une fois de plus au XIVe siècle, la musique repose essentiellement sur une matière sonore vocale. Comment tiens-tu compte de cette contingence lorsque tu composes ?

Je pense que la vocalité de l’époque est assez « rude » et à la fois séduisante. Parce qu’elle fonctionne sur de petites cellules mélodiques. On n’a jamais de grandes lignes, seulement de petites formules, de petits hoquets. Je suis très attiré par ces principes « minimalistes » de l’écriture qui se reflètent aussi bien dans ma musique vocale qu’instrumentale. Par exemple, dans le quatuor à cordes « De faubles est aünez », qui sera créé à Ars Musica, je n’utilise pas beaucoup de notes, d’événements sonores. Mon matériel est extrêmement réduit mais cependant très riche dans son utilisation.

… avec une originalité que j’ai pu saisir en lisant ta partition : l’exploitation d’une grammaire micro-tonale…

“De faubles est aünez” - extrait de la partition

Tout à fait. Mais pour comprendre mieux la chose, je partirai du titre, issu de vers de Fabliaux de l’époque de Machault. C’est une littérature aujourd’hui encore assez méconnue, qui parodie tout la littérature courtoise – comme celle de Chrétien de Troye, ou encore Tristant et Yseult. Elle la soumet à une forme de subversion avec un humour inégalé dans la littérature de ce siècle. Dès lors, je me suis dit : pourquoi ne pas à mon tour travestir Machault et le faire « sourire » avec la distance de l’histoire qui nous sépare de lui. Attention « faire sourire » n’implique pas nécessairement un humour au premier degré, du pastiche. Non, j’emprunte d’abord à Machault le travail des proportions, des rapports rythmiques, une conception du temps qui peut nous amener à une conception de la transcendance. Ces emprunts, j’essaye de les travestir par un système harmonique qui est articulé sur cette micro-tonalité, ces divisions plus petites que le demi-ton extrêmement sophistiquées, et qui tente la distanciation par rapport à la référence originelle, tout en respectant l’esprit.

Pour conclure cette entrevue, pourrais-tu nous dire comment vis-tu ce séjour berlinois ?

Heute, bist du « ein Berliner » ?

: -)

Je suis venu à Berlin pour étudier la flûte à bec. Tant que j’y étais, j’en ai profité pour parfaire mes études de composition. Je me suis vite rendu compte de l’incroyable vitalité de la ville. Surtout, j’ai été surpris de me rendre compte de l’invraisemblable polyvalence qui caractérise les compositeurs ici. Finalement, Berlin est un formidable carrefour où se rencontrent des créateurs issus des quatre coins de la planète, avec des attentes et des envies tellement différentes d’une personne à l’autre. La création musicale à Berlin, c’est en fait un « grand désordre ». Finalement assez représentatif de la musique d’aujourd’hui. Ce nombre d’approches originales, ce grand mélange permanent qui vous fait voyager de la scène électronique traditionnelle à celle de l’improvisation, en passant par une scène trans-media extrêmement riche et passionnante, tout cela donne la sensation qu’il est difficile ici d’être un « compositeur normal ». Les événements ne sont pas toujours d’une grande qualité, mais on ne peut qu’être attiré par ces démarches multiples, ces prises de positions radicales auxquelles on ne peut rester indifférent. En ce qui me concerne, j’ai une idée précise de mon orientation esthétique. Si les expériences de la scène artistique berlinoise sont riches et multiples, je ne les ai jamais imaginées comme des marchandises de grand magasin où j’aurais puisé mes idées. Mais c’est indéniable que je ne peux éviter certaines influences récentes qui orientent ma manière de penser la musique. Comme par exemple comment relier le monde de la technologie avec celui de l’instrumental sans nécessairement utiliser le support de la technologie. Pour appuyer mes propos, j’aurais presque envie de dire qu’il suffit simplement de vivre l’écoute d’un motet de Dufay dans une grande cathédrale. Voilà une grande expérience acoustique impossible à retrouver avec les plus grands moyens technologiques actuels ou par le biais de la haute-fidélité la plus sophistiquée… Dès lors où situer le lien entre cet émerveillement vécu et une écriture contemporaine ? Voila une question qui me passionne mais à laquelle je ne peux encore réellement répondre.

Gregory D’Hoop : « De faubles est aünez », Quatuor à cordes (création)

Quatuor Diotima, Théatre Marni, le 15 mars 2012 à 20h15.

Rencontre avec le compositeur à 19h.

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Gregory d'Hoop en compagnie de l'auteur du blog et de Geoffrey François (en bas de l'image) Festival Loop 2012 © N. Momitani

 

 

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Ci-dessous, un extrait de Une Roe qui tourne (2011) de Gregory d’Hoop

Ensemble Sturm und Klang, direction Thomas Van Haeperen

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Le programme 2012 est sorti de presse !

•6 février 2012 • 3 commentaires

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Une fois n’est pas coutume, la page du jour sera extrêmement courte. Juste pour saluer enfin la sortie officielle du programme du Festival Ars Musica 2012.

Il y a quelques jours à peine eut lieu notre conférence de presse annuelle afin d’annoncer les multiples événements qui ponctueront mars 2012. Le fait qu’aucun journaliste ne se désista – et Dieu sait si la table fut garnie pour l’occasion ! -, témoigna de l’intérêt des médias pour ce nouveau printemps de la musique contemporaine (ne devrait-on pas parler de la « musique en train de se faire » plutôt que d’utiliser ce mot galvaudé de « contemporain » ?). Une respiration, un air frais, c’est tout ce que nous vous souhaitons avec une floraison inouïe de jeunes compositeurs, un bouquet de senteurs musicales variées et quelques grands noms pour ponctuer le tout. Voilà ce que vous pourrez découvrir en feuilletant le programme de cette année, que je vous propose de découvrir ICI.

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James Plakovic - World Beat Music !

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Le site d’Ars Musica (www.arsmusica.be), quant à lui, ouvrira bientôt « ses portes » pour apporter de multiples informations complémentaires à ce petit fascicule qui nous parlera des sonorités d’un monde en mouvement. Pages web en actualisation permanente, agrémentées de textes, programmes détaillés, fichiers mp3 et vidéos. Car tout n’est pas encore mentionné dans ce petit livret de poche « Altra Cosa », qui vous accompagnera tout au long de vos pérégrinations musicales. Particulièrement en ce qui concerne les « actions grands public »  et « Conservatoires » lors des journées « Portes ouvertes » de Liège le 3 mars, les « Journées Japon » des 17 et 18 mars ainsi que les « Journées conservatoires » de Mons (du 6 ou 9 mars) et de Bruxelles (les 15 et 16 mars). Retenez ces dates, vous y serez conviés à vivre l’événement, rencontrer les compositeurs lors de Master-classes et d’ateliers-Analyse (en collaboration avec le Conservatoire de Mons, la Société Belge d’Analyse Musicale, Charleroi-danse, et j’en oublie certainement). Venez-y nombreux car ces journées seront riches en surprises, rencontres et manifestations en tous genres. De multiples fenêtres ouvertes sur la sensibilité d’aujourd’hui.

Nous comptons dès lors sur vous pour qu’Ars Musica retrouve son sens de la fête, comme nous avons plu la vivre à la création de ce qui est devenu aujourd’hui une vénérable institution. La Musique est un acte de vie et d’espoir. Espoir de rencontrer l’autre ou de s’émerveiller. Sans refuser le goût du risque. Ce qui rend l’aventure encore plus enthousiasmante.

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Dans cette perspective, je vous donne rendez-vous d’ici quelques jours afin de découvrir Grégory D’Hoop, un « tenant » de la toute nouvelle génération, oscillant entre Bruxelles et Berlin.

A+

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Ramon Lazkano, notre « moment-faveur » du festival 2012

•30 janvier 2012 • Laissez un commentaire

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« Moment-Faveur », une notion inventée par François Nicolas, qui correspond très bien au bonheur que j’ai eu d’être invité – il y a quelques jours – par Ramon Lazkano. Moment d’échanges, quelques mots, quelques réflexions à propos de musiques, de « sa » musique, mais aussi de tout et de rien. De ces petites choses qui remplissent notre vie de cette nécessité vitale de comprendre un peu mieux le monde, ou de le critiquer.

L’invitation était d’autant plus agréable qu’il m’accueillait chez lui ; l’épreuve de l’intimité, là où les énigmes de compositeurs se mettent au vestiaire pour parler de sensibilité à sensibilité. Toutefois, pour y parvenir il me fut d’abord donné de survivre à un dédale de couloirs et d’escaliers mystérieux en colimaçon qui évoquaient ici et là mon Maurits Escher adoré. La surprenante topographie des lieux maîtrisée, je me suis soudainement retrouvé dans un appartement qui fleurait bon l’intimité, aux lignes délicates rehaussées de livres soigneusement disposés dans une illusoire négligence calculée. Une impressionnante rangée de la Pléiade me mit en confiance. Quant au piano à queue, il devait me confirmer que nous étions bien dans l’antre d’un artiste. Je dois toutefois vous avouer que l’hôte le plus impressionnant à ce moment fut le silence, luxe quasi inconnu au coeur de la capitale française. Bref, je me retrouvais au beau milieu d’un appartement à l’image de ses propriétaires : raffiné, délicat et nimbé d’une incroyable palette de couleurs de terre. Terre d’ombre, terre fumée, terre orangée… Seule l’une ou l’autre blancheur de partition ou de page ouverte du dernier livre traduit de Murakami tranchait sur cette enivrante monochromie diversifiée.

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La voix de Lazkano me rappella étrangement les désirs de Luigi Nono : apprendre à écouter les nuances de l’infîme. Une voix de velours, sourde et pianissimo qui incite à écouter encore plus attentivement ses dires, comme si une discussion se transformait en laboratoire de découverte de l’autre. Et ce mot de « laboratoire » n’est pas choisi au hasard. Le compositeur y fait constamment référence dans son oeuvre. Notamment lorsqu’il cite le travail de l’artiste basque Jorge Oteiza. Ce dernier refusait le Musée pour revendiquer le Laboratoire. L’occasion de rechercher dans l’intimité quotidienne la radicalité du geste créateur. « Dans son laboratoire, il plie des morceaux d’insignifiances qui gisent sur nos bureaux. Non pas d’un geste machinal, mais dans le souci constant de transformer la matière. Dans les répétitions des jours, ces exercices lui font faire de ces morceaux insignifiants de surprenantes sculptures que l’on regarde aujourd’hui comme des oeuvres d’art. Rien d’autre au fond qu’un détournement d’usage, un pacte conclu avec le matériel bureaucratique pour l’arracher à son destin tragique. »

(Denis Laborde « Ortzi Isilak, Dialogue de l’Océan et de la Craie », in Ramon Lazkano, La ligne de craie, Edition 2E2M, 2009)

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Laboratoire de Craie, Laboratoire de papier… L’oeuvre de Oteiza nous parle d’une forme de subversion, mais aussi de rédemption de la matière par sa décontextualisation, sa « déterritorialisation » nous dirait Deleuze. Car tout se tient, par rhizome interposé ; des multiples particules de cette matière en mutation, jusqu’aux poussières qui troublent notre perception de l’objet réalisé.

Lazkano, face aux sculptures en craie de Jorge Oteiza

Quant on connait l’oeuvre de Lazkano, on comprend tout de suite l’intérêt du compositeur pour son alter ego plasticien. La CDMC (Centre de Documentation des Musiques Contemporaines) a d’ailleurs organisé il y a quelques mois une rencontre autour de ces « Laboratoires » musicaux dont vous pouvez avoir quelques échos ICI. Car le musicien se veut aussi sculpteur de la matière sonore, en agissant sur elle comme on agit sur un bloc de craie ; en la faisant éclater, en la griffant, en faisant jaillir d’un bloc informe des associations de particules (d)étonnantes, sans jamais négliger notre perception. Esthétique du cheminement, entre effort et naturel, sans concession à l’égard de l’auditeur ; juste pour avoir la chance de pouvoir l’émerveiller par des amalgames inouïs, de nouveaux dires à mille lieux des esthétiques mille fois rabâchées. Et puis, la musique respire de son originalité. L’expérience de Lachenmann y est digérée depuis longtemps. La spectralité aussi (n’oublions pas que Lazkano fut élève de Grisey). Pesson, ami de toujours, à contribué à cet effacement de la mémoire du spectre et du concret. A l’effacement d’une culture entretenue patiemment chaque jour comme un artisan de l’information.

Reste l’origine du créateur, basque. Eötvös me disait que nos compositions subissaient les inflexions de notre langue d’origine. La prosodie, mais aussi la syntaxe, la pensée qui sous-tend la construction de la phrase. J’ai beaucoup discuté de ce sujet avec Ramon mercredi dernier. L’ami linguiste qui nous accompagnait m’a surpris lorsqu’il me signala que la syntaxe du basque était assez analogue à celle du Japonais (la langue de mon épouse que je tente d’appréhender comme je peux) : une construction inversée de la notre. A la différence du japonais – qui néglige l’individu au point d’oublier de le mentionner dans la phrase, ce qui la rend parfois bien énigmatique – le basque ose son identité. Pas étonnant au vu de ses antécédents historiques, politiques et culturels. Si on ose aborder ce terrain glissant, Lazkano n’a jamais exprimé, lors de notre conversation, une quelconque velléité autonomiste. Il se sent bien dans les deux rôles, basque et espagnol. Toutefois, la reconnaissance culturelle fait partie de ses désirs. Pour preuve, référez-vous aux titres de ses compositions : Ilunko, Hauskor, Egan (dont les quatre opus seront proposés par Musiques Nouvelles le mardi 13 mars), Mugarri (proposé par l’Orchestre National de Belgique le 22 mars), ou l’intitulé de son tout dernier quatuor qui sera créé par Diotima le 16 mars, Lurralde.

Finalement ce sentiment n’a cessé de ponctuer notre rencontre, depuis la révélation surprenante de la participation de notre compositeur-phare 2012 à l’élaboration du « Basque sans peine » de la méthode Assimil, tout autant que le « Basque de poche », deux livres édités en compagnie de Jean-Charles de Beaumont ; jusqu’aux échanges passionnés à propos de Ravel (un de mes compositeurs « non-contemporains » de prédilection). J’ai enfin compris pourquoi Ramon était si heureux que sa pièce Mugarri soit proposée, pour sa création belge, en compagnie de ce grand représentant de la musique française. Française, vraiment ? Un acte d’intégration nationale peut-être un peu trop vite énoncé… De fait, Ramon n’a eu de cesse de me pointer les références basques dans l’oeuvre de son illustre prédécesseur, depuis les rythmes et sonorités du concerto – que l’on a trop souvent qualifié de jazzy, alors que Ravel s’est directement inspiré du Biribilketa – en passant par les inflexions prosodiques basques qui inondent l’oeuvre vocale du grand Maurice. Et, Ramon, de me rappeler que Ravel parlait cette langue Basque aux racines mystérieuses (souvenez-vous que, au même titre que le finno-ougrien, elle ne s’intègre pas dans le corpus des langues indo-européennes), ce que les musicologues oblitèrent encore aujourd’hui trop souvent ! Bref, une belle leçon d’analyse en temps réel.

Je pourrais encore m’étendre sur les multiples thèmes abordés lors de notre entrevue. Mais la discrétion doit parfois permuter avec l’emphase pour éviter l’anecdote. Pour preuve, Debussy signalait que la musique se substituait aux mots lorsque ceux-ci n’arrivaient plus à exprimer la réalité des choses. De fait, j’ai tenté d’en savoir un peu plus à propos du quatuor que Diotima créera à Ars Musica le 16 mars prochain. Peu de mots se sont échappés de la bouche du compositeur pour évoquer sa dernière oeuvre, comme si une pudeur ultime confinait la confidence au silence. Le vin dégusté à ce moment n’a guère suffi pour en connaître un peu plus sur les sons impalpables issus de l’imaginaire de ce musicien admiré. Tout au plus quelques énigmes. Et une origine. Ramon m’avoua que le titre provenait d’un échange téléphonique avec Gérard Pesson. Ce dernier lui avait signalé que « la solitude est un territoire » – « Lurralde » en Basque. Autre confidence, la lecture de « La carte et le territoire » de Houellebecq l’avait titillé peu avant la composition de l’oeuvre. L’argument de ce roman me rappelait une conversation que j’avais eue avec Ramon à propos de Mugarri, écrite peu après le décès d’un proche. La solitude prenait sens. S’ensuivirent quelques réflexions sur un ton de voix de plus en plus intimiste : « La solitude n’est pas l’oeuvre d’un individu replié sur lui-même. Elle n’existe que parce que nous avons un rapport à l’autre, dans notre rapport au monde. De fait, Lurralde est une sorte de cartographie, la découverte progressive d’un topos musical avec ses reliefs, ses détails. Une sorte de plan où les signes orientent les artistes. Un espace où l’auditeur devient une sorte de Vasco de Gama « errant » au hasard des découvertes de nouveaux territoires. » Je lui signalai que certaines de ces oeuvres précédentes fonctionnaient avec une absence formelle a-priori. Un risque pour un compositeur. Car c’est à l’auditeur de découvrir la forme au fur et à mesure de l’organisation des flux sonores. La forme comme devenir du matériau. En réponse à cette réflexion, le compositeur s’empara d’une maxime : « C’est l’oeuvre qui impose ses règles et non les règles qui façonnent l’oeuvre. Pour preuve, cette séquence inoubliable, gardée dans les archives de l’INA, où Boulez tente de démontrer à Stravinsky qu’il y a une erreur dans l’écriture des Noces. Et Stravinsky de répondre… Il n’y a pas à chercher l’erreur, « cela doit être ! »  Dans le même ordre d’idée, je me souviens d’une conférence de Grisey à propos de Talea. On lui avait signalé une erreur du fait qu’il manquait un certain nombre de mesures si on suivait la logique numérique qu’il avait édictée comme système. Gérard répondit simplement que ce « manque » faisait partie de la nécessité formelle de l’oeuvre. »

L’épilogue était tout trouvé. Bravo aux compositeurs qui écoutent leur partition, les nécessités qui en émanent, quitte à remettre en question le système qui organise la matière en un tout cohérent. Le risque fait toujours partie du voyage, mais en cas de réussite, vive le « grand large » ! Gageons que Ramon Lazkano fait partie des compositeurs qui correspondent à ces précédentes phrases, avec sa sensibilité exquise, mais aussi avec sa rigueur de pensée alliée à la transparence de l’émotion, comme peu d’artistes osent le faire aujourd’hui.

Sur ce, nous bûmes une dernière gorgée de ce vin agréable avant de nous quitter jusqu’à notre prochain rendez-vous en mars prochain, à Bruxelles. Il viendra pour s’entretenir avec nous, en paroles et en musiques. Soyez nombreux à nous rejoindre.

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Penser la musique pour mieux la vivre ? Bienvenue au Colloque « Ars Musica » des 21 et 22 mars 2012…

•22 janvier 2012 • Laissez un commentaire

Je profiterai de cette nouvelle page pour paraphraser mon propre texte d’introduction que vous retrouverez dans la brochure du Festival 2012, document qui sera disponible  d’ici peu. Et oui, rendez-vous est donné le 31 de ce mois pour la conférence de presse de présentation de cet « Altra Cosa », cette « autre cause » – à moins que ce ne soit une « autre chose » – qui nous parlera de ce rapport à l’autre, une dimension extrêmement présente dans nos interrogations d’hommes du XXIe siècle.  Cette question trouvera évidemment son prolongement dans la programmation, à la fois multiple et subjective, de la prochaine édition d’Ars Musica.  Car se confronter à l’altérité, c’est se donner la liberté de la découverte d’un ailleurs insoupçonné, stimulée par une musique qui parle au cœur et à l’âme de ceux qui désirent autre chose qu’un simple divertissement. C’est militer pour d’autres choix que ceux de la consommation culturelle massive. Mais si la musique est une fête de la perception, ce serait dommage de ne s’en tenir qu’à sa dimension hédoniste, d’autant plus que l’événement s’inscrit dans un Festival censé réfléchir sur la création contemporaine. Oui, l’écoute musicale est un témoin révélateur de notre état du monde et de nous-même. Un plaisir de la découverte à l’occasion de fenêtres subjectives ouvertes par les créateurs (histoire de faire un petit clin d’oeil à Léonard de Vinci). Mais poser quelques jalons intellectuels me semble conforter un apport sensible non négligeable à notre écoute, afin de stimuler notre prise de position, de titiller notre faculté d’émettre une pensée critique, celle-là même qui me semble si souvent absente en ce début de siècle.

Leonard de Vinci – Bacchus (détail)

Alors, si Musiques il y aura de manière intense, place sera faite aussi à la réflexion, à la rencontre entre penseurs et artistes, qui nous proposera un complément d’informations sur la création actuelle. C’est la raison pour laquelle j’ai mis sur pied un colloque qui se tiendra les 21 et 22 mars prochain dans le cadre prestigieux de l’Académie Royale de Belgique. Subjectivité oblige, j’ai désiré mettre cette manifestation sous l’égide d’un de mes mentors, l’une des personnes qui m’a le plus bouleversé lorsque j’étais étudiant au Conservatoire Royal de Liège : Célestin Deliège. Ce sera donc un vibrant hommage qui sera rendu à ce brillant musicologue, ami des Pousseur et autre Boulez,  disparu récemment et encore si présent dans nos mémoires. La dédicace est d’autant plus appropriée que le personnage passionnait ou agaçait avec ces prises de positions radicales. Je me souviens de grandes discussions où nous nous échangions de multiples idées excitantes sur des problématiques compositionnelles, où nous nous querellions aussi, à propos de positions esthétiques – et je me souviens de son exaspération face à mon intérêt pour les musiques répétitives américaines ou les méandres planantes de certaines musiques méditatives des pays de l’Est. Mais l’argumentation qu’il déployait se révélait à chaque fois magnifique. On pouvait ne pas être d’accord avec lui, mais il forçait l’admiration par cette manière d’inciter d’abord à réfléchir et à rechercher dans le labyrinthe des connaissances les arguments qui posaient avec subtilité notre point de vue, quelque soit son orientation. La leçon fut magnifique. Certes l’homme fut radical dans ses réflexions, ses positions que je ne partageais pas toujours. Cependant, la nouveauté l’intéressait en permanence et l’histoire a peut-être eu tort de le cantonner exclusivement dans l’orée Darmstadtienne et de la musique d’après-guerre. Son assiduité au festival jusqu’à la fin de sa vie, ses grands coups de gueule (Ah, ces grands conflits ouverts et publics avec Harry Halbreich, autre sommité, tout aussi « grand personnage » haut en couleur !!!) démontraient son intérêt pour la Musique avec un grand M, et de la volonté de comprendre son implication sonore dans la cité actuelle.

Je visionnais hier, en privé, un film réalisé par Guy-Marc Hinant et Dominique Lohlé, un documentaire sur le personnage qui nous pourrions découvrir en périphérie de ce colloque. Ecce Homo. Le penseur révèle sa superbe malgré son grand âge, mais aussi pessimiste, annonçant dans la foulée d’Hegel la « fin de l’Art ». Ce « déclin », selon lui (et j’agrée dans ce sens) trouve son origine dans notre société « démocratique » (critiquée intelligemment par Deliège, nous ramenant ainsi aux critiques platoniciennes) qui, sous la pression de l’effet de masse, l’attire dans les limbes du spectaculaire. Le constat est lucide mais non pas dénué de fondement. Personnellement, je serai plus optimiste en me disant qu’après la mort de l’Art naîtront de nouveaux concepts à la hauteur de l’imaginaire humain, toujours en recherche de nouvelles solutions. Finalement, l’Art Occidental est une invention récente dans l’histoire de l’humanité. Au Phénix de renaître selon les nouvelles configurations du Monde, et de se dire que certains arguments de Célestin peuvent dès lors être repensés comme lui-même avait pensé avec beaucoup de pertinence la réalité du monde dans lequel il a gravité. C’est la raison pour laquelle si ce colloque rend hommage au grand penseur, il tentera aussi de dépasser les valeurs qu’il a édictées tout au long de sa vie riche en découvertes. Ainsi la manifestation s’ouvrira-t-elle sur un « après » de la radicalité, sur une image du monde de demain, sa globalisation, ses traverses multiples et l’urgence des communications nouvelles qui incitent à repenser le modèle dans lequel le sonore trouve sa place et continuera de la trouver.

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Et puis, pour ceux qui ne connaissent pas Célestin Deliège, ou ceux, nostalgiques, qui veulent entendre à nouveau sa voix, voici un petit témoignage capté lors d’une conférence qu’il donna au Conservatoire de Liège le 4 décembre 1984 à l’occasion d’une journée Stockhausen que quelques valeureux étudiants, dont votre modeste blogeur, avaient organisé en ces temps mémoriaux. L’occasion d’entendre deux petits extraits issus de cette journée, qui nous rappellent l’érudition du personnage, mais aussi sa causticité et la radicalité de certaines de ses prises de position. Quelques sentences riches d’enseignements, mais aussi prémonitoires….

Voici donc, pour débuter de manière paradoxale, l’épilogue de cette conférence, une critique large des dernières oeuvres de Stockhausen, l’occasion pour Deliège de rebondir sur la responsabilité d’une société à l’égard de ses artistes. Cette prise de position du musicologue est certainement riche d’enseignement sur le personnage et de son humeur ; mais aussi un témoignage émouvant qui j’espère vous interrogera tout autant que moi.

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Conférence Stockhausen / 4 décembre 1984 / Conservatoire Royal de Liège 
Célestin Deliège – extrait 1  (6’19 »)
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Et pour ne pas rester sur une note pessimiste, vous pouvez toujours écouter en guise de second extrait l’introduction de cette conférence sur Stockhausen. Pour information, cet événement  fut enregistré par mes soins avec les moyens frustres de l’époque, sur cassette (ce qui explique la médiocrité du son), un document retrouvé dernièrement dans mes archives. Dans cet Incipit, le discours dépasse à bien des égards le cadre « Stockhausenien ». De plus, comment ne pas résister à  quelques petites anecdotes personnelles savoureuses à propos du compositeur :

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Conférence Stockhausen / 4 décembre 1984 / Conservatoire Royal de Liège 
Célestin Deliège – extrait 2  (11’03 »)
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En guise de point final à cet article, une petite vidéo, une « mise en bouche » afin d’annoncer la thématique abordée lors de la journée du mercredi après-midi de notre colloque : Musique et mondialisation/ globalisation, l’occasion de retrouver deux compositeurs belges mis à l’honneur lors de notre Festival : Fabrizio Cassol et Jean-Pierre Deleuze, artistes partagés entre les visions occidentales et celles de l’Afrique ou de l’Asie.
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Une année nouvelle !!! Rencontre avec Erin Gee

•12 janvier 2012 • 3 commentaires

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2012. Voilà, nous y sommes. Dans moins de deux mois débutera un Ars Musica bigarré dont le programme fut concocté lentement, passionnément, euphoriquement, mais aussi parfois avec désespoir et déceptions. Bref, les coups de coeur d’un amoureux de musique dont les éclats multiples ponctueront un mois de mars scintillant, rempli d’événements variés dont la teneur sera définitivement révélée le 31 janvier lors de la conférence de presse de présentation de l’édition 2012.

D’ici là, je profite de cette nouvelle page pour vous souhaiter une excellente année nouvelle. Que 2012 vous apporte son lot de découvertes passionnées et passionnantes. Que ces quatre nouveaux chiffres vous offrent l’élan sacré ; le désir de s’engager dans de nouvelles aventures humaines qui vous permettront d’apprécier le monde qui nous entoure, de jouir de ce pouvoir de l’imaginaire humain déployé pour créer des nouvelles réalités qui permettront à chacun de dépasser la grisaille d’une quotidienneté colorée par des prédictions économiques situées aux antipodes des espoirs rayonnants promulgués par les multiples artistes de notre planète.

Ouvrons nos oreilles. Et pour inaugurer ce mois de Janus, quoi de mieux qu’un de ces coups de coeur mentionnés plus haut ? L’oeuvre d’une compositrice qui m’a littéralement envoûtée, captivée un soir de 2007, par hasard. Une oreille négligemment jetée sur les ondes d’une radio diffusant quelques musiques de notre temps. De ces musiques comme on en entend « à la pelle », en veux-tu en voilà. Et puis, soudain, le « Choc ». L’illumination sensible. Quelque chose de merveilleux qui vous fait dresser les cheveux sur la tête et qui se love au creux de l’oreille pour ne plus jamais vous quitter. La compositrice concernée m’était inconnue, mais j’ai fait des pieds et des mains pour  la contacter et lui manifester mon admiration. Des mots gentils; intelligents et judicieux devaient répondre à mon mail fervent. Ainsi, Erin gee, compositrice américaine, venait-elle de rentrer dans le catalogue de mes compositeurs/trices contemporain(e)s de prédilection. Et sa Mouthpiece IX pour voix et orchestre, ne plus me quitter depuis ces temps bénis.

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Surprenante que la première audition de cette Mouthpiece. Et l’on s’étonne de cette musique organisée autour de l’intimité de la voix, sonorités magnifiques et fragiles à la fois, faites de vocalisations étranges, de bribes de textes dont le sens échappe, de sifflements et de bruits de bouche. Certaines sonorités vocales semblent vouloir nous ramener à l’enfance, d’autres frisent l’incandescence, l’envol d’un papillon iridescent qui frôle l’oreille et vous murmure quelques grésillements sensuels. Comme si Laurie Anderson s’était acoquinée avec un clone discret de Lachenmann pour s’enfuir sur une île paradisiaque avec pour seule compagnie une série de LPs issus de groupes pops expérimentaux.

Mouthpiece IX-extrait

Erin Gee use de sa voix comme personne. Et la compositrice rejoint les rangs de ces compositeurs-interprètes avec pour particularité le fait que son instrument ne corresponde pas aux canons classiques qu’on lui attribue habituellement. Point de voix d’opéra, mais un timbre original, personnel et unique. Guère étonnant qu’elle consacre l’essentiel de ses compositions à sa propre voix à travers une multitude de « Mouthpieces » dont l’esthétique se raffine à chacun des nouveaux avatars. Voyages sonores imaginaires, ces pièces dévoilent un pan de leur originalité lorsque la compositrice nous avoue tirer son inspiration d’éléments extrêmement diversifiés et témoignant de son immense culture : de ses expériences de vie personnelles,  des respirations du langage, des sonorités  védiques et des musiques non-occidentales – particulièrement africaines – mais aussi des expériences pops (Cocteau Twins).

Avec humour, elle relie son langage musical aux sonorités de la « Commedia dell’arte », forme satyrique du 16e siècle, qui n’hésitait pas à importer de nombreuses onomatopées et du langage mimétique. Elle va même plus loin lorsqu’elle qualifie son esthétique du terme de « grammelot ». Pour information,ce grammelot provient de la littérature médiévale et fait référence à  « une modalité autre du rapport entre la voix et le geste […] un refus du discours avec des mots précis et définis, le grammelot est accentuation mais non rupture au sein du dire […] Son utilisation est de l’ordre de la modulation et non de l’altérité linguistique.[…] Chaque auditeur remplira ces sons des contenus les plus proches de son expérience et de sa culture. L’essentiel est que le message soit entendu. »

(Denis Ferraris, Marina Marietti (Directeurs de publication) Modèles médiévaux, Presse Sorbonne Nouvelle, 2004)

Pour situer la compositrice, rappelons qu’elle est venue, début des années 2000, en Europe après avoir terminé des études de piano  (!!) et de composition aux États-Unis. Elle s’est établie durant six ans en Allemagne et en Autriche, pays où elle découvrit ses potentialités vocales et se perfectionna auprès de Beat Furrer, Matthias Spahlinger, Chaya Czernowin, Steve Takasugi et Richard Barrett. En 2007 elle obtenait un Doctorat de l’Université des Arts de Graz. Lauréate de nombreux prix,  elle fut compositrice en résidence à l’Académie Américaine de Rome, à l’Akiyoshidai International Village au Japon en 2005-6, ou encore à l’Akademie Schloss Solitude de Stuttgart en 2010. Son opéra Sleep fut créé à l’Opéra de Zurich en 2009.

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Sleep - Opéra de Zurich

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Mais plutôt que de me perdre en dithyrambes vaines, je vous propose de faire votre opinion personnelle à propos ce cette compositrice. Pour vous y aider, j’ai fait un petit montage à partir d’une émission qui fut diffusée sur internet par la radio américaine « The voice of Fairfield », que j’avais enregistrée à l’époque. La qualité sonore n’est pas des meilleures, mais vous pourrez découvrir les moments phares de cette émission en cliquant le lien ci-dessous. Seul bémol pour certains, les interviews sont en anglais… Mais pour ceux qui ne comprennent pas cette langue, il reste la musique, prédominante dans l’enregistrement proposé :

The Classical Hour – 15 juin 2007 – Erin Gee – 16’30 »

Présentation James Moore

contenu :

(00:00 – 06:50) – Mouthpiece IX – 2006 (extrait, 6’50 »)

(06:50 – 08:40) – Interview 1 (1’50 »)

(08:40 – 10:30) – Mouthpiece pour voix solo (extrait, 1’50 »)

(10:30 – 11:22 ) – Interview 2 (52″)

(11:22 – 12:03) – Mouthpiece VII (extrait 41″)

(12:03 – 14:42) – interview 3 (2’39 »)

(14:42 – 16:30) – Mouthpiece pour voix solo (extrait, 1’48 »)

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Alors, convaincus ? Si oui, Venez nombreux au concert d’ouverture de la session Bruxelloise du festival. Et c’est encore Le Balcon qui est dans le point de mire. Cet ensemble met les bouchées doubles pour nous offrir un très très grand moment de musique. Maintenant vous connaissez le programme complet de ce concert du 8 mars 2012 qui risque de rester gravé longtemps dans nos mémoires de festivaliers. Pensez-donc :

Erin Gee : Mouthpiece XII /  Segment of the 3rd Letter  

Ledoux : La Terre sans mal

– Pause –

Romitelli : l’intégrale des 3 « Professor Bad Trip« 

D’ors et déjà, bonne écoute et excellentes découvertes.

Bruxelles-Brésil / rencontre avec Marlui Miranda

•26 décembre 2011 • Un commentaire

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A quelques encablures de l’année nouvelle, voici mes dernières lignes de décembre. D’abord pour vous souhaiter d’excellentes fêtes de fin d’année, en espérant que 2012 vous offrira quantité de découvertes merveilleuses, musicales (je croise les doigts pour qu’Ars Musica en fasse partie) et autrement artistiques, mais aussi profondément humaines.

Dans cette perspective, j’aimerais vous offrir comme cadeau de fin d’année le témoignage d’une rencontre exceptionnelle :

Il y a une dizaine de jours, Marlui Miranda se produisait au Senghor dans le cadre d’Europalia Brasil. Connue dans son pays, mais encore peu courtisée sous nos contrées, cette ethnomusicologue de formation, mais aussi merveilleuse musicienne intégrant dans ses chants les merveilles sonores assimilées lors de ses séjours en immersion au sein des populations indigènes du Brésil, ne cesse de surprendre par ses « grands écarts » entre la recherche et la pratique artistique. Lors de ses performances, elle offre à ses auditeurs une narration trans-genre. Musiques ethniques, populaires, expérimentations sonores, jazz, voire le divertissement. Elle est de ces personnes modestes qui, malgré un certain âge (elle est née en 49), manifestent une insatiable curiosité en s’associant – pour ce qui la concerne – avec des musiciens remarquables (comme à Senghor, avec Caito Marcondes, incroyable percussionniste brésilien, ami de longue date ; ou encore John Surman, saxophoniste de jazz).

Bref, Marlui, je l’ai découverte lors de mon séjour brésilien il y a quelques années. j’avais été ébloui par son CD « Ihu », magnifique exemple de ses pérégrinations artistiques originales. Pour Ars Musica, je voulais qu’elle soit inscrite d’une manière ou d’une autre au programme. De fait, dans ce cadre, j’organiserai les 21 et 22 mars prochains un Colloque à l’Académie Royale de Belgique, à propos de la création au XXIe siècle (retenez les dates, je vous donnerai prochainement les informations complètes). Elle y sera présente virtuellement lors de la demi-journée consacrée à la mondialisation/globalisation artistique. Pour cela, je l’ai rencontrée il y a quelques jours, et j’ai réalisé un entretien filmé qui sera diffusé le 21 mars après-midi.

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Marlui Miranda à la Maison des Musiques – Bruxelles 18-12-2011

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Pour vous donner un avant-goût, voici quelques extraits de l’interview qu’elle a bien voulu m’accorder ; J’ai transcrit quelques révélations à propos de l’altérité artistique telle qu’elle peut être perçue dans un autre coin du monde. Un témoignage entre anthropologie et pratique musicale, l’expression d’une relation intime de longue date entre une dame au grand coeur et les Indiens de son pays :

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Il y a une histoire au Brésil : la musique des indiens ne fera jamais partie de la culture des musiques du pays. Parce que cette musique n’a jamais été comprise en tant que telle. Elle a toujours été envisagée en adoptant un point de vue « religieux », comme si il y avait quelque chose de démoniaque dans cette musique. De fait, cette vision provient de descriptions de voyageurs qui n’ont perçu qu’une partie de la réalité. Il est vrai que les contacts furent toujours difficiles, et le demeurent même aujourd’hui. Dès lors, la musique des indiens se confine dans une sorte de « secret ». Personne ne peut rentrer en contact avec cette musique. D’ailleurs les gens n’ont pas d’oreilles pour l’écouter. Au Brésil, elles s’intéressent plutôt aux origines portugaises, africaines des musiques actuelles. Cela a créé une frontière entre les deux aires. [D’une part la musique populaire, et d’autre part] la musique des indiens du côté des ethno-musicologues, du monde académique ; quelque chose dont on parle, mais que l’on écoute peu.

Personnellement je n’ai jamais adhéré à cela. Je pense que cette aire des indiens doit être reconnue en tant que telle et sera de plus en plus appréciée dans le futur. Mais aujourd’hui, il y a encore des peurs qui font qu’un ethno-musicologue – ou un artiste – s’intéressant à ces musiques soit immédiatement catalogué et doive faire des compromis. Donc ce n’est pas facile pour une jeune personne de s’engager tant les conséquences sur son avenir sont importantes actuellement.

[…]

En ces moments, il se passe un phénomène intéressant dans la plupart des tribus d’indiens du Brésil. Les anciens manifestent le désir d’enregistrer les musiques de leur tradition pour avoir une référence sur la manière d’interpréter ce répertoire. J’ai collaboré avec une douzaine de ces projets. On a enregistré, filmé ces manifestations avec les nouvelles technologies qui étaient à notre disposition. Ainsi ces tribus avaient la satisfaction de garder la mémoire de leur tradition pour les générations futures. Chose importante quand on sait que les jeunes générations négligent leur langue originelle, leur culture. Donc c’est une raison fondamentale pour réaliser un tel travail.

[…]

Pour revenir à Levi-Strauss [qui a observé durant de nombreuses années les indiens du Brésil], un tel acte pourrait s’apparenter à ce qu’il considérait comme « le témoignage d’un acte inscrit préalablement dans la nature et sa transformation ». D’où provient leur musique et en quoi elle peut être transformée ? Cette question est très importante pour eux car ces indiens aujourd’hui vivent dans l’idée que rien n’est immuable, tout est en changement. Et les médias ont leur place dans cette dynamique. Pour exemple, les indiens ont l’habitude de fabriquer une « boîte » [malle] dans laquelle ils conservent avec soin les objets délicats et fragiles des cérémonies. Des plumes et dents de jaguars chassés par la famille, transformés en colliers ; et encore bien d’autres objets. Curieusement, ils considèrent les CD comme ces « boîtes » où ils conservent les idées sonores les plus précieuses, ou les communications avec les esprits. Même si c’est un fragment, c’est suffisant pour eux. Les indiens connaissent donc les valeurs de la technologie. Cela confirme la dualité du monde dans laquelle ils se meuvent avec beaucoup d’aisance

[…]

Cela a changé d’ailleurs mes rapports avec eux. Pour ces indiens, la difficulté résidait dans ce qui était « correct » ou non. Au début, quand je voulais reprendre un chant originel, ils voulaient que je le chante du début jusque la fin. Et cela durait… deux jours ! Vous comprendrez que je préférais que cela dure un peu moins longtemps, en utilisant des fragments. J’ai tenté de faire des compromis avec eux. Au début c’était vraiment impossible car ils refusaient catégoriquement. Mais depuis qu’ils fabriquent eux-même leurs enregistrements pour promouvoir leur culture, ils comprennent la nécessité du processus de fragmentation. Et depuis, ils acceptent que j’utilise l’un ou l’autre extrait de leur musique, de chants de cérémonie ou autre répertoire, pour les intégrer dans une production artistique. Cela leur permet de voyager en pensée avec moi.

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Marlui Miranda et Caito Marcondes, jouant un instrument indien à la destinée étrange. Un beau témoignage qui renforce mon idée de la « porosité sensible ». Les particules originales des cultures ne connaissent pas de frontière et voyagent au gré des rencontres d’imaginaire pour façonner un monde de demain qui, j’espère sera organisé autour des nouvelles molécules de ce savoir intime. Non pas une « chimie » de la matière, radicalisée par une science omniprésente. Plutôt « alchimie » née des désirs humains dans leur impulsion vers l’autre, les éloignant du repliement sur soi si caractéristique de ce début de millénaire.

L’autre, cet inconnu. Mieux le connaître, c’est aussi se donner certaines clés d’action. C’est aussi prendre conscience de certains enjeux planétaires dont on veut nous faire croire qu’il n’y a pas d’autres solutions que de les subir. l’Art, finalement, ne serait-ce pas se donner certains outils de connaissance sensible qui nous permettraient de nous situer au sein d’une entropie informationnelle galopante ; et de redéfinir les points cruciaux qui permettent de donner du sens à notre humanité.

Marchant dans les pas de Marlui Miranda (dans une nettement moindre mesure !), apprendre à mieux connaître la situation des Indiens du Brésil m’a bouleversé. Je n’en suis pas sorti indemne. Tant il existe des fils concrets qui nous relient à ces populations pourtant si éloignées. Deleuze parlerait de Rhizome. Il y a eu aussi ce film : La terre des hommes rouges de Marco Bechis, avec pour acteurs des indiens amateurs. A voir absolument ! Cela dévoile un pan du drame. Ma pièce La Terre Sans Mal parle de ce tissage invisible entre nous et les Indiens Guarani. D’un drame certes, mais aussi d’un espoir possible creusé dans notre écoute de ces minorités. Voici d’autres causes qui méritent qu’on se penche sur elles car elles participent de ce même désir d’espace et de vie.

image extraite du film : "Auprès de l'Amazonie : le parcours de Claude Lévi-Strauss" (2008)

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Terre sans mal, l’histoire d’une trajectoire et d’une recherche. Ma musique parle de ces espaces en mouvance, en déshérence, de territoires volés pour des raisons économiques et de forêt dévastées. D’espaces spirituels et de désirs de rejoindre le lieu de résolution des conflits, sans mal. Vous comprendrez dès lors mieux mon désir de destiner cette pièce à un ensemble « sonorisé », avec ses espaces sonores modulables ; depuis l’image déployée – grâce aux haut-parleurs – dans l’ensemble de la salle de concert, jusqu’au point étouffant d’une source sonore ramenée frontalement en mono, comme pour « enfermer » le son instrumental dans une prison acoustique. Métaphore des lieux. La pièce fut créée à Paris par Le Balcon en février dernier. Scoop : cet ensemble de jeunes musiciens enthousiastes viendra à Bruxelles pour nous offrir lors de la soirée d’ouverture bruxelloise, le 8 mars, la création belge de cette oeuvre « électrique » dont vous pouvez entendre les dernières minutes ci-dessous. Petit bémol toutefois, l’enregistrement est celui de la création, fait avec un petit enregistreur portable dans une salle très réverbérante… soyez donc tolérant avec le son ! Mais cela vous donnera une petite idée de cette oeuvre engagée pour laquelle j’ai une affection toute particulière.

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[audio https://ledouxclaude.files.wordpress.com/2011/12/terre-fin.mp3]

Claude Ledoux : La Terre Sans Mal (extrait)

Ensemble Le balcon, dir. Maxime Pascal  (Live – février 2011)

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Levi-Strauss nous rappelait combien était important de garder les témoignages de la diversité de notre monde. La fin de la « terre sans mal » vous aura certainement surpris, car le montage ultime fut réalisé à partir d’une interview d’indiens glanée sur Youtube ! Signe des temps… Mais aussi pour clamer haut et fort que pléthore d’informations ne rime pas avec connaissance intime du monde. A l’instar des mots prononcés par ces indiens à la fin de la pièce. Énigme… Mais si vous voulez savoir ce qu’ils signifient je vous convie à lire la notice de cette oeuvre ICI. Et de vous sensibiliser à la problématique essentielle de vie de ces êtres, qui n’est pas sans lien avec notre consommation de biocarburants… !

Une merveilleuse nouvelle année pour toutes les minorités de ce monde… mêmes musicales !

Liège – Buenos Aires / Rencontre avec Lucas Fagin

•15 décembre 2011 • Laissez un commentaire


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Liège, ma belle. Meurtrie. Quelle tristesse que de voir ma ville de prédilection assombrie par un triste fait d’actualité ce mardi 13 décembre.  Un carnage bien loin de l’image de cette cité d’habitude si « ardente » et bienveillante. Une pensée émue donc en direction de ces amis blessés ou bouleversés par cet événement qui nous rappelle la fugacité de notre être.

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Liège : Palais des Princes-Evêques

Mais que les tragédies momentanées ne nous fassent pas oublier que Liège fut toujours témoin d’une action culturelle vive. Certes, de par son passé somptueux de Principauté Moyen-âgeuse (qui nous a transmis une effronterie « indépendentiste » toujours d’actualité) ; mais aussi par les traces qu’elle a laissées dans l’histoire de la musique du XXe siècle. Grand merci d’ailleurs à Henri Pousseur pour le dynamisme qu’il a insufflé au sein de la culture musicale liégeoise, ce qui d’ailleurs m’a permis – en tant qu’étudiant – de rencontrer fréquemment les Berio (parrain d’une fille d’Henri), Globokar, Kagel, Cage, Stockhausen (à qui l’on doit un « Alphabet für Liege »); Rzewski (dont je fus l’assistant en composition au début des années 80) et autres nombreux amis du compositeur, qui venaient lui rendre fréquemment visite.

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Boulez-Pousseur (photo P. Froidebise) / Pousseur-Stockhausen ©Ludwig
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Liège, c’est aussi la ville qui donna un coup de pouce à Eliott Carter lorsque son premier quatuor remporta  en 1953, année de sa création, le premier prix d’un concours international de composition mis sur pied pour rappeler l’importance internationale de l’école liégeoise de violon (dont l’influence est encore sensible dans le concerto pour violon de Philippe Boesmans).

Et comptez sur moi pour continuer à promouvoir cet élan créatif à l’occasion d’Ars Musica 2012. Leo Ferrer ne clamait-il pas : « dans la rue la musique » (voir un des premiers blogs)…. Il m’inspire, et c’est la raison pour laquelle je vous convierai en premier lieu à une « journée porte ouverte » de la musique contemporaine à Liège (évidemment !) le samedi 3 mars 2012.

Palais des Princes-Evêques - Salons du Gouverneur

Dans la rue… ou mieux : en bordure de rue ! Les « Salons littéraires » (place de la République française !!!), la Cour du Palais des Princes-Évêques (cf. la belle gravure ci-dessus) ainsi que les « Salons du Gouverneur », le Cinéma Sauvenière, autant de lieux qui ont répondu présent à mon appel et qui vous convieront à flâner dans le centre-ville pour y découvrir des lieux inconnus, parfois des liégeois eux-mêmes, résonants en ce début mars des musiques de notre temps qui nous seront proposées par des amateurs (fanfares et chorales), des jeunes, des finalistes des conservatoires, et, évidemment par des professionnels. Dès janvier, précipitez-vous sur le programme qui dévoilera en détail ces « Laptop and Co », « Expérience Mélies » et autres « Horizons percutants » qui ponctueront cette après-midi du 3 mars, de 14 à 18 heures. L’occasion de passer par notre bonne vieille cité, de visiter ses berges de Meuse. Et de vibrer à la confluence de ces micro-évenements qui se conflueront en soirée par un superbe concert du Quatuor Danel à la Salle Académique de l’Université de Liège.

Pour les amoureux de l’aube « vingtièmiste », les Danel nous confieront les états d’âme contenus dans le quatuor de Ravel. Le coup de coeur de mes quatorze ans. Mais rassurez-vous, la création y sera au rendez-vous, avec l’Argentine en invitée d’honneur – et deux quatuors en création ! Et pour la représenter tout d’abord Sebastian Rivas déjà bien connu en Europe ; ensuite un jeune d’une incroyable vitalité, résidant à Buenos Aires (où il est né), nanti d’un imaginaire débordant : Lucas Fagin. Compositeur né 1980, lauréat de nombreux concours (1er prix Ginjoan, Juan Carlos Paz, Concours Takemitsu, Unesco, et j’en passe !), il nous offrira le 3 mars en soirée la création de son nouveau quatuor à cordes. En attendant de découvrir cette musique spécialement écrite pour vos oreilles, je vous propose de rencontrer virtuellement le compositeur. Pour cette fois, point de texte. Asseyez-vous tranquillement dans un fauteuil et écoutez cet entretien qu’il m’a accordé il y a quelques semaines lors d’un passage en Europe pour une récente création parisienne.

Quatre « moments » en sa compagnie. Le premier pour pour parler de sa condition de compositeur sud-américain :

entretien – partie 1 – 5’37

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Pour illustrer cette interaction entre musiques traditionnelles argentines et musiques contemporaines, voici un extrait vidéo surprenant concernant le travail créatif réalisé par les membres de l’Orquestra de Instrumentos Autóctonos y Nuevas Tecnologías de la UNTREF

Ouvrez, vos oreilles, voici de l’ « inouï » pure souche !!!

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Deuxième partie de l’entretien  :

entretien – partie 2 – 4′

Troisième partie qui nous permettra de découvrir une oeuvre pour orchestre du compositeur, Arqetipo, hommage à Ligeti.

entretien – partie 3 : 5′  / Arquetipo – 2007 (pour orchestre / OLC, dir. Zolt Nagy) : 12′

Et en guise de péroraison, une belle réflexion sur la manière dont le compositeur imagine l’émotion et la sensibilité dans la musique contemporaine, le tout illustré par un extrait de sa dernière oeuvre créée tout récemment.

entretien – partie 4 : 45 sec.  /  

Lanterna Magica – 2011 (pour percussion, 2 violons, alto, violoncelle et contrebasse – extrait) – 3 min

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Lucas Fagin - Claude Ledoux / novembre 2011

 

Cette rencontre est la première d’une série à venir de découvertes de voix de compositeurs présents à Ars musical 2012. Restez donc à l’écoute de ce blog et rendez-vous  la semaine prochaine.

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